15.5.11

La Congrégation des Veuves de Ti-Zoulou

En tant que membre de la Congrégation des Veuves de Ti-Zoulou, mieux encore en tant que chef de Septaine de cette confrérie dont la dévotion consistait à faire une fois par semaine le Chemin de la Croix, à tour de rôle de telle manière qu'il en ait un au moins de fait chaque jour sans interruption, Artémia, dont le jour était le mardi, était exemplaire. Pas un mardi où, en état de grâce, contrite de ses péchés et décidée de demeurer fidèle à Son Seigneur, elle ne s'acquittât de ses obligations, pas un mardi où elle ne trottinât d'un pied de la croix à l'autre, d'une station á l'autre le long des 3320 pas de la Voie Douloureuse comme une femelle raccoon diligente en quête de miel, comme un cabri en quête de pâturage entre les quatorze stations et le maître-autel. Et quand bien même elle fût malade elle ne se dérobait pas et faisant fi du privilège de prier devant un crucifix indulgencié en récitant un petit acte de contriction ou le verset: "Te, ergo, quoesumus, familis tuis submemi, quos pretioso sanguine tedemisti" comme le permettait Sa Sainteté le Pape, elle se rendait religieusement à l'église pour accomplir son devoir avec la certitude que le jour où elle quitterait ce monde ce serait en odeur de sainteté. Elle avait ainsi emmagasiné des milliers des milliers et des milliers d'années d'indulgences plénières et des centaines de milliers d'années d'indulgences partielles mais la grâce qui surpassait toutes les autres c'était l'Absolution Générale qu'elle recevait jusqu'à 36 fois par an et par laquelle on lui restituait l'innocence du baptême et où elle recevait la Très-Sainte Eucharistie comme s'il se fût agi d'une cuillère de confiture de banane. Sans compter qu'elle devait bien plus qu'à son tour remplacer au pied levé au pied de la Croix de Jean-Zoulou XXIX l'un, alité, ou l'autre en déplacement. Tout ça valait bien un océan infini de miséricordes. Le mardi c'étaient des milliers d'âmes qu'elle allait délivrer du Purgatoire et même si toutes ces activités ne faisaient pas d'elle une Sainte Clarisse, elle n'en était pas moins la plus fameuse pénitente de la paroisse de Kalakata et de toutes les autres paroisses des Reliques Unies.
Comme tous les membres de la Congrégation elle se devait de porter autour du cou un chapelet séraphique, symbole de pénitence, pauvreté et chasteté. On pouvait porter le chapelet sur la chemise. Le cordon pouvait être de fil, de coton, de lin ou de chanvre, en soie ou en ruban de corde nouée de couleur blanche et on ne devait le quitter qu'en cas de nécessité, pour le reprendre dès que cela redevenait possible. Quant aux grains de cette patenôtre séraphique ils pouvaient être d'os ou de corne, de corail ou de nacre, d'ambre ou de jais, de bois ou de cristal de roche avec des grosses perles pour marquer les décades en ambre ou en corail ou en perle précieuse comme l'émeraude, l'améthiste, le saphir, l'or ou l'argent. et pour couronner le tout un ou deux pompons rouges.

La Congrégation des Veuves de Ti-Zoulou se partageait en séries de deux sortes: les Septaines, ceux qui s'engageaient à faire un Chemin de la Croix par semaine à tour de rôle et les Trentaines, ceux qui promettaient d'assurer un Chemin de la Croix par mois. Chaque Paroisse de l'Archipel des Iles-Unies des Reliques formait en moyenne entre 3 et 4 septaines et 4 et 5 trentaines, ce qui garantissait 7 chemins de la Croix chaque jour dans chaque paroisse. Pour faire partie de la Confrérie on devait verser aussi un tafia dans le cas des membres de Trentaines et 4 tafias dans le cadre des Septaines pour l'acquit des messes.

La Confrérie s'était placée sous le patronage principal de Saint-Antoine-des-Plaisirs-Divins (dont la solennité est fixée le 13 juin)et sous le patronage secondaire de Saint Pantaléon et de Saint Léonard de Port-Maurice.
Sa Sainteté le Pape avait accordé une indulgence plénière aux conditions ordinaires de la confession et de la communion aux jours suivants, savoir:
1) le jour de l'entrée dans la Confrérie
2)`à l'article de la mort
3) le jour de la fête patronale de la Confrérie, le 13 juin
4) le jour de la fête de Saint Pantaléon le dernier dimanche de juillet
5) le jour de la fête de Saint Léonard de Port-Maurice le 26 novembre
En outre de ces indulgences les associés jouissaient encore des avantages suivants:
1) Une messe en entrant dans la confrérie pour la bonne mort du premier de la série qui laissera cette vie
2) A la mort une messe avec une communion un Chemin de la Croix de tous les associés de la série

Les fêtes spéciales de la Confrérie sont le Vendredi Saint, l'Invention de la Sainte Croix (le 3 mai), l'Exaltation de la Sainte Croix (le 14 septembre).
Les huit fêtes suivantes instituées par l'Eglise dans un but de réparation, les mystères et les instruments de la Passion de Notre Seigneur font l'objet d'une dévotion toute particulière et sont célèbrées par la réception de la Sainte Communion:
1) L'oraison de Notre Seigneur au Jardin des Oliviers (le mardi après la Septuagésime)
2) La commémoration de la Passion, le mardi après la Sexagésime
3) La Sainte Couronne d'Epines, le vendredi après la Quinquagésime
4) La Lance et les Clous, le premier vendredi de Carême
5) Le Saint-Suaire, le second vendredi de Carême
6) Les Cinq-Plaies, le troisième vendredi de Carême
7) Le Précieux Sang, le quatrième vendredi de Carême et le premier dimanche de juillet
8) Le Sacré-Coeur, le vendredi après l'octave du saint-Sacrement
Quant aux 36 jours d'Absolution Générale c'étaient:
le jour de l'Immaculée-Conception, à Noël, à la Circoncision, à l'Epiphanie, à la Purification, à la Saint-Joseph, à l'Annonciation, au dimanche des Rameaux, à chacun des jours de la Semaine-Sainte, au Dimanche de Pâques, à l'Ascension, à la Pentecôte, à la Trinité, à la Fête-Dieu, à la fête du Sacré-Cœur, le 21 juin, (en mémoire de l'anniversaire de l'entrée du Pape Pie IX dans le Tiers-Ordre), à la Saint-Pierre, à la Visitation, à la fête de Sainte-Claire (le 12 août), à l'Assomption, à la Saint-Louis, à la Nativité, à la Saint-François (le 4 octobre), à la Toussaint, à la fête de Sainte-Elizabeth de Hongrie (le 19 novembre), à la Présentation, et enfin, le 25 novembre, à la fête de Sainte Catherine, vierge et martyre. En outre, on pouvait recevoir l'Absolution générale quatre fois encore par an, n'importe quel jour, et ces quatre jours-là on recevait de plus la Bénédiction Papale, comme au 21 juin: en tout trente-six fois par an.